C’est fou comme les dames ont bien plus d’imagination et d’allant que les hommes quand il s’agit de chanter l’amour. C’est souvent plus direct, décomplexé. Elle, Michèle Buirette, entame ce nouvel album par l’amour cannibale : « Au secours je suis dans tes entrailles / C’est la pagaille / Faut plus que j’y aille / Je suis dans tes viscères / Ta chair m’enserre… » La poésie a encore gagné du terrain.
Le reste n’est pas pareil, qui se réfugie plutôt dans une chanson très cabaret, très rue aussi, ambiance années cinquante et soixante, avec cependant – et c’est là l’atout majeur de ce disque bien plus qu’estimable – l’accordéon swing et la guitare manouche qui font que notes et mots s’envolent au gré de mélodies fort réussies. Tout est léger, tout suggère le printemps (de chroniquer, certes avec grand retard, ce disque au printemps se justifie) même si elle traite 68 par son été « après un printemps bien agité » : « Nous abandonnions la cité / Paris mai et ses barricades / Ainsi que nos chers camarades /Nos cœurs emportés dans la tornade / Battaient encore la chamade / Exaltés / Nous jetions des pavés / Pour combattre nos aînés. » En fait, cet album va de Parfum[s] de révolution aux Hommes de [sa] vie, à constamment faire le lit du changement « mais je ne suis pas une fille facile / oh, c’est très rare que je me déshabille ». La révolution pouvant passer, il va de soi, par « Hampton et Kenny / Ellington Basie / Dizzy Gillepsie… » Jazz à tous les étages, donc. Mais aussi « le rock’n roll et la java / la valse, le twist et le cha-cha-cha ». Ce disque, de belle écriture, animé par des mélodies allant de Jo Privat à Django Reinhardt, c’est de le bougeotte permanente : mettez-le sur votre platine le matin, ça vous donnera, plus encore qu’une poudre chocolatée, fut-elle aux céréales, de l’énergie pour toute la journée. C’est un petit régal, comme un indice de liberté, la preuve du possible bonheur.
Ajouté par Michel Kemper le 8 avril 2017.
Nos enchanteurs, le quotidien de la chanson